11. Le Pasteur travaillant à l'évangélisation de la culture. L'Evangile transcende toutes les cultures et ne s'identifie à aucune d'elles (cf. Jn 18,36). Cependant, le Royaume qu'annonce l'Evangile est vécu par des hommes profondémment liés à une culture, et la construction du Royaume ne peut se faire en laissant de côté les éléments culturels. Ce secteur important a une profonde signification dans l'évangélisation missionnaire, qui se situe en effet dans la ligne de l'Incarnation du Verbe. L'Eglise a le devoir non seulement d'évangéliser les cultures, mais aussi de favoriser et d'accueillir toutes les ressources, les richesses humaines et religieuses, les coutumes des peuples, dans la mesure où elles sont bonnes; elle doit porter la Bonne Nouvelle à tous les niveaux de l'humain, pour les transformer du dedans, les purifier des éléments négatifs, anciens et nouveaux, de telle sorte que le message évangélique puisse s'exprimer à travers des expressions intelligibles et valables.
L'inculturation est d'abord le fait des Eglises particulières, comprises comme communautés vivant une expérience quotidienne de foi et d'amour. Les spécialistes peuvent la stimuler et la guider; ils n'en sont pas les acteurs principaux. De plus, l'inculturation ne peut être réalisée par une seule communauté: elle ne peut être effectuée que par un ensemble d'Eglises vivant dans une aire culturelle déterminée. L'inculturation, enfin, n'est pas une action accomplie une fois pour toutes: c'est l'intégration permanente de l'expérience chrétienne dans une culture, qui n'est elle-même ni stable ni achevée.
Il faut se souvenir que l'Evangile, durant des siècles, a pénétré tant de cultures différentes, assumant leurs valeurs, qui sont devenues des valeurs humaines universelles, éléments capables de répondre aux requêtes de toute culture. Cette conviction stimule et guide l'inculturation du message évangélique en toute culture particulière. Il faut tenir compte de ce fait, dans le discernement des éléments d'une culture, pour ne pas aboutir à une oeuvre de démolition et priver ainsi un groupe humain d'un héritage culturel qui appartient au patrimoine de toute l'Eglise.
Les prêtres s'engageront avec confiance dans ce domaine très exigeant de leur apostolat; ils apprendront à porter sur leur propre culture un jugement équitable, c'est à dire à distinguer les valeurs, les déficiences ou les erreurs, et à discerner les conséquences du péché, de telle sorte qu'ils ne prennent pas pour une véritable valeur n'importe quelle expression culturelle.
Ils garderont présent à l'esprit que l'inculturation ne doit pas compromettre l'unité de l'Eglise, mais qu'elle doit toujours partir, comme de sa base, de la Sainte Ecriture et se développer en demeurant attachée à la Tradition, en accord avec les orientations et les directives du Magistère vivant (105). Pour que l'inculturation atteigne son but et que les fidèles ne soient pas désorientés, les prêtres agiront en union avec l'Evêque et avec les autres prêtres, suivant un programme commun, établi au niveau de la Conférence Episcopale (106).
Dans ce contexte on ne peut ignorer le rôle de la religiosité populaire catholique présente dans le pays. Considérée comme un ensemble de valeurs, de croyances, d'attitudes appartenant à la religion catholique, la religiosité populaire est un milieu privilégié de dialogue entre l'Evangile et la culture. Elle exprime la sagesse d'un peuple. Par conséquent, pour évangéliser à fond une culture, il importe d'accorder une réelle importance à cette religiosité. Les prêtres veilleront avec soin à ce que la religiosité populaire se nourrisse d'une connaissance authentique du message chrétien et ne tombe pas dans la magie, la superstition, le fatalisme ou une autre forme déviée de religiosité (107).