Conférencier : Mgr Gabriel SAYAOGO, évêque de Manga
3. Le vice de forme de célébration du mariage : canons 1108-1123
La célébration du mariage constitue non seulement un acte liturgique, mais aussi un acte juridique ayant ses conséquences tant pour les sujets eux-mêmes que pour la communauté. L’intention de convoler en justes noces doit être manifestée devant l’autre partie et aussi devant la communauté. Pour cela, l’Eglise a institué sa propre forme publique et sa propre liturgie pour le mariage : c’est la forme canonique. Ainsi, comme le souligne la Constitution dogmatique ‘’Lumen Gentium’’ 11b, ceux qui se marient dans le Seigneur acquièrent un état de vie spécial avec des dons et des tâches propres au milieu du peuple de Dieu. Celui qui assiste au mariage le fait au nom de l’Eglise. Il n’exécute pas ses volontés mais s’acquitte d’un devoir, et doit respecter scrupuleusement les normes déjà établies.
a. La forme ordinaire de célébration : canons 1108-1115
• Une norme de base : canon 1108
Sauf exception déjà mentionnée par le même droit, seuls sont valides en soi, les mariages contractés ‘’in facie Ecclesiae’’, ce qui signifie, les mariages célébrés
- avec assistance qualifiée de l’Ordinaire du lieu, ou du Curé, en raison de leur charge d’âme, ou encore d’un quelconque prêtre ou d’un diacre, chargé par l’un des deux premiers d’assister le mariage.
- et en présence de deux témoins.
•Exigences pour l’assistance valide par l’Ordinaire du lieu ou le Curé : la territorialité et le rite : canon 1109
La faculté de l’Ordinaire du lieu, du Curé et de ceux à eux équiparés d’assister aux mariages est strictement territoriale. Elle ne peut donc être exercée validement que dans les limites de leur circonscription ecclésiastique. Hors de leur territoire, ils n’ont aucune faculté, et pour assister validement, ils ont besoin d’une délégation en bonne et due forme données par l’Ordinaire du lieu ou le Curé. Sur leur propre territoire par contre, ils assistent à tout mariage, pourvu que l’une des parties contractantes au moins soit de rite latin, et à condition que les mêmes ministres sacrés ne soient pas sous le joug d’une peine canonique : excommunication, suspense ou interdit. Signalons, en passant, que la sanction doit toujours être imposée par décret ou sentence, ou déclarée.
• Les compétences de l’Ordinaire du lieu et du Curé personnels : canon 1110
En règle générale, les diocèses et les paroisses sont territoriaux. Pour des motifs pastoraux, ils peuvent aussi être personnels (cf. can. 518). L’Ordinaire du lieu et le Curé personnels sont eux aussi tenus de rester dans les limites de leur juridiction pour assister validement aux mariages de leurs sujets. Ex : l’aumônier militaire de Ouagadougou peut assister aux mariages des militaires et paramilitaires résidant partout dans l’archidiocèse de Ouagadougou, mais ne peut les poursuivre à Koudougou, à Pô ou à Ouahigouya, à moins que son aumônerie ne s’étende jusque dans ces territoires ou localités.
•Assistance au mariage par des laïcs : canon 1112
C’est une solution d’urgence pour les régions où manquent des prêtres et des diacres. Pour une telle pratique, il faut d’abord un vote favorable de la Conférence épiscopale et ensuite la permission du Saint-Siège. La délégation relève strictement de la compétence de l’Evêque diocésain. Le Vicaire général, le Vicaire épiscopal le feraient seulement s’ils ont reçu mandat spécial de l’Evêque diocésain.
b. La forme extraordinaire de la célébration : canon 1116
Sans ouvrir la porte à des abus, le canon prévoit des cas où pour sérieuse nécessité, le mariage est valide et licite, même si la forme canonique ordinaire venait à ne pas être observée. Ce sont les cas de péril de mort, de persécution de l’Eglise, de manque de ministres sacrés. Dans ces situations, le mariage pourra être contracté en présence des seuls témoins. En cas de péril de mort, le ministre sacré qui serait présent peut dispenser de la présence des témoins et d’autres empêchements selon les canons 1079 et 1080. Exception faite pour les cas de péril de mort et des cas d’extrême urgence, il est préférable de mandater des laïcs comme assistants au mariage.
c. Notes complémentaires : canons 1117-1123
• Le lieu de la célébration : canon 1118
Le mariage étant un sacrement, par principe, sa célébration se ferait dans l’église paroissiale. Pour des raisons relevant de l’ordre pastoral, sa célébration pourrait se faire dans tout autre lieu convenable, même dans une sacristie, avec ou sans la permission de l’Ordinaire du lieu ou du Curé, selon les cas.
•L’inscription (notification) du mariage : canons 1121-1123
Chaque fois qu’un mariage est célébré, convalidé au for externe, déclaré nul ou dissous, notification sera faite dans le registre propre aux mariages et dans le registre des baptêmes.
4. Les mariages mixtes : canons 1124-1129
En langage canonique, on parle de mariage mixte lorsqu’il s’agit d’un mariage entre un baptisé catholique et un baptisé d’une communauté ecclésiale dont l’Eglise latine reconnaît le baptême même si cette Eglise n’est pas en pleine communion avec elle. Les autres mariages sont dits dispars (avec disparité de culte) parce que contractés entre un baptisé catholique et un non baptisé (même catéchumène) ou entre un baptisé catholique et un adepte d’une communauté ou Eglise dont Rome ne reconnaît pas le baptême.
Dispositions canoniques sur les mariages mixtes
. La célébration de ces mariages est interdite par le droit canonique parce qu’ils ne permettent pas une communion spirituelle véritable. Pour les célébrer, il est nécessaire une autorisation expresse de l’Ordinaire du lieu (can. 1124).
. Pour concéder la permission, l’Ordinaire jugera : du sérieux de la partie catholique dans le respect de ses obligations de foi ; de la sincérité de l’engagement de la partie non catholique ; et il s’assurera que tous deux sont prêts à accepter pleinement ce que l’Eglise catholique enseigne en matière de mariage (can. 1125).
. Par esprit d’œcuménisme, il est permis à un ministre non catholique de participer convenablement à une célébration matrimoniale dans une église catholique, et en cas de dispense de la forme canonique, le ministre catholique peut aussi participer à la célébration dans une église non catholique. Il est strictement interdit aux deux ministres de demander le consentement l’un après l’autre au cours de la même célébration, tout comme il est interdit au ministre catholique d’assister au mariage dans une église catholique si le consentement a déjà été demandé ou sera demandé au cours d’une célébration non catholique (can. 1127 § 3).
. Attitude à adopter dans la célébration d’un mariage avec disparité de culte : observer les prescriptions des canons 1127 et 1128, c’est-à-dire interdiction du double consentement et la nécessité d’un accompagnement plus personnalisé du couple après la célébration (can. 1129).
5. La célébration du mariage en secret : canons 1130-1133
Pour des causes graves et urgentes (laissées à son propre jugement)[1], l’Ordinaire peut autoriser la célébration en secret d’un mariage. Les conditions qui entourent cette célébration sont que l’enquête préalable est secrète : pas de publication de bans ; pas de grande assistance à sa célébration : seulement le témoin qualifié, les témoins ordinaires, les époux qui doivent garder le secret autour de sa célébration. L’Ordinaire du lieu est lui aussi tenu d’en garder le secret. Ce mariage est inscrit dans un registre spécial, conservé dans les archives secrètes de la curie. Si l’observation du secret s’avérait préjudiciable à la foi et aux mœurs, ou devait nuire au mariage lui-même ou causer un grave scandale[2], l’Ordinaire n’est plus tenu de garder le secret et les parties seront informées de cette clause avant la célébration même du mariage.
[1] Exemples de causes graves et urgentes : concubinage occulte ; disparité de condition sociale du couple ; opposition déraisonnable des parents…
[2] Des raisons qui n’obligent plus l’Ordinaire à garder le secret : tentative de contracter un autre mariage de la part des ou de l’un des époux, comportement public de leur part qui laisse croire qu’ils sont concubins… Le respect du secret oblige les époux à consulter l’Ordinaire avant de rendre public leur mariage si ils désiraient le faire. Naturellement, l’Ordinaire peut s’y opposer.